Depuis de nombreuses années, nos organisations ont entamé leur mue en prenant le virage de la transformation numérique. La communication interne n’y échappe pas et se traduit par l’usage massif d’outils numériques : plateformes collaboratives, réseaux sociaux d’entreprise, messageries instantanées, infolettres automatisées… Si ces solutions apportent vitesse et accessibilité, elles peinent parfois à répondre à des besoins humains fondamentaux comme l’écoute et la création de liens sociaux durables. Inutile de rappeler que nous sommes des animaux sociaux : le « tout-numérique » révèle rapidement ses limites lorsqu’il remplace les interactions humaines essentielles.
L’efficacité du numérique… et ses limites
Les outils numériques ont fait évoluer la communication interne : ils facilitent la diffusion de l’information, permettent de toucher rapidement l’ensemble des collaborateurs et collaboratrices et d’en mesurer les impacts à l’aide d’indicateurs précis. Ils sont devenus incontournables dans les stratégies RH modernes. Toutefois, ces constats s’appliquent principalement aux entreprises caractérisées par des fonctions dites de bureau. Il convient en effet de rappeler, comme pour le télétravail, que de nombreux métiers ne s’exercent pas derrière un écran (p. ex., bâtiment, industrie, transport, etc.).
Avec quelques années de recul (et des audits), l’expérience dans les organisations nous a montré que les outils numériques ne garantissaient pas la qualité des échanges humains. Des études montrent que même si les canaux numériques améliorent l’accessibilité à l’information, ils ne compensent pas pleinement la satisfaction et l’engagement générés par les interactions en personne. Autrement dit, la convenance numérique ne remplace pas la richesse des échanges humains directs, surtout dans des contextes émotionnels ou complexes.
L’humain au centre : une nécessité biologique et sociale
L’interaction humaine ne se limite pas à l’échange rationnel d’informations; elle constitue aussi un phénomène social profondément ancré dans notre évolution. Selon la Media Naturalness Theory, ou la théorie du naturel des médias, la communication en face-à-face constitue le mode de communication le plus « naturel » pour les êtres humains, façonné par des millénaires d’interactions sociales. Notre cerveau est ainsi conçu pour détecter les signaux non verbaux, les nuances émotionnelles et les contextes relationnels que le numérique ne peut saisir entièrement. Ces capacités ont évolué précisément pour nous permettre de naviguer dans des groupes sociaux complexes.
Ainsi, même dans un environnement professionnel numérisé, les interactions humaines (physiques et riches en contexte) restent indispensables pour renforcer l’appartenance, la compréhension et la confiance.
Vers une communication interne hybride et humaine
Les pratiques gagnantes ne rejettent pas le numérique, mais l’intègrent de manière équilibrée avec des moments en présentiel pour développer les liens. Une stratégie hybride combine :
- Le numérique : pour la diffusion rapide de l’information, l’accès à des ressources partagées et des rétroactions structurées.
- L’humain : pour les échanges contextuels, la création de sens et la motivation collective (p. ex., réunions en présentiel, ateliers, rétroactions directes, rituels d’équipe, etc.).
Des recherches récentes montrent que la fréquence d’interactions sociales est corrélée à une plus grande satisfaction des collaborateurs et collaboratrices, même dans des organisations très numérisées. Cette approche hybride valorise les outils sans perdre de vue ce que chaque outil ne peut pas remplacer : l’intuition, l’empathie et la synchronisation émotionnelle propres aux relations humaines.
Conclusion
Le numérique est un levier puissant pour la communication interne : il fluidifie les échanges, améliore l’accès à l’information et soutient la transformation des organisations. Pourtant, son adoption ne doit pas faire oublier que l’humain demeure le cœur de toute communication significative. Parce que nous sommes naturellement des êtres sociaux, les interactions humaines enrichies sont indispensables pour nourrir l’engagement, la cohésion et le sens partagé au sein des équipes. Le défi pour les RH et les responsables de la communication interne consiste donc à orchestrer des stratégies hybrides où technologie et humanité interagissent plutôt que de se substituer.
