Dans le monde des organisations, on parle beaucoup de prospection et de développement des affaires. Mais comment établir un partenariat dès le premier contact? Comment transformer une simple conversation en une relation de confiance?
Cette question m’habite depuis quelque temps. J’ai longtemps eu tendance à aborder mes rencontres d’exploration comme un exercice de persuasion: comment bien me présenter, comment susciter l’intérêt, comment démontrer ma valeur. Mais plus je multipliais les échanges, plus je réalisais que ce n’est pas la qualité de mes arguments qui fait la différence, mais celle de mes questions.
C’est en cherchant à comprendre comment poser les bonnes questions que je suis tombé sur le livre Questions that Sell de Paul Cherry, un ouvrage marquant pour quiconque souhaite développer son influence sans manipulation.
Ce que j’aime chez Cherry, c’est sa manière de repositionner le rôle des professionnels et professionnelles. Il ne s’agit plus d’user de techniques de vente et de persuasion, mais bien d’adopter une posture de partenaire démontrant de la curiosité et de l’empathie.
Un client ne cherche pas un ami, mais quelqu’un capable de comprendre ses enjeux, de minimiser ses risques et de contribuer à ses objectifs. C’est à cette condition que la relation devient porteuse de sens.
Cherry rappelle aussi une réalité étonnante: dans les interactions commerciales, les gens ne partagent qu’environ 20% de ce qu’ils pensent vraiment, et quelque 90% des vendeuses et des vendeurs ne savent pas poser les bonnes questions ou ont peur de le faire. Cela signifie que notre mission n’est pas de parler plus, mais de poser les questions qui ouvrent la porte au reste.
Cherry propose six grandes catégories de questions. Chacune joue un rôle spécifique dans la construction d’un lien plus profond. Voici trois de ces types, qui sont particulièrement utiles pour les gens qui veulent développer leur influence relationnelle.
Elles permettent d’introduire un sujet avec respect et curiosité, tout en se positionnant comme un consultant ou une consultante plutôt qu’un vendeur ou une vendeuse.
«J’ai lu récemment un article sur les défis de la rétention du personnel. Comment ces enjeux se manifestent-ils dans votre milieu?»
Cette approche valorise l’autre et ouvre la conversation sur son expertise. On ne cherche pas à enseigner, mais à comprendre.
Elles visent à creuser un mot ou une idée clé évoquée par l’autre.
«Tu as parlé de “frustration”; qu’est-ce qui t’amène à utiliser ce mot?»
Ce type de question aide à décoder ce qui est implicite et à amener la discussion sur un terrain plus personnel et plus vrai. Cherry distingue trois niveaux d’engagement chez l’interlocutrice ou l’interlocuteur:
Identifier le bon niveau change tout: on adapte alors sa posture, sans forcer le rythme de l’autre.
Elles déplacent la conversation du présent vers l’avenir.
«Et si ce problème disparaissait, qu’est-ce que ça changerait pour ton équipe?»
Ces questions activent l’imagination et les aspirations. Elles permettent de révéler les besoins implicites: sécurité, reconnaissance, stimulation ou autonomie.
Ce que Cherry met en lumière, c’est qu’une question bien formulée n’est pas un outil de persuasion, mais un levier de transformation. Elle permet à l’autre de se comprendre, de clarifier ses priorités, parfois même de reformuler son problème.
Mais attention: le questionnement demande de la sensibilité. Trop de questions, trop tôt, peuvent sembler intrusives. L’art consiste à alterner écoute et curiosité, tout en restant sincère dans son intention d’aider.
Poser de bonnes questions, c’est finalement une posture de présence, une manière de créer un espace où l’autre peut réfléchir à voix haute et découvrir ses propres réponses.
Pour aller plus loin, j’ai mis à l’épreuve les principes de Cherry avec un petit groupe de partenaires d’apprentissage. Ensemble, nous avons fait des jeux de rôle: un consultant, un prospect, un observateur et un animateur.
Cinq minutes suffisent pour réaliser que poser une question, c’est déjà un acte d’écoute active. Que l’on soit dans la vente, le coaching ou le leadership, cette compétence est transversale. Elle permet non seulement d’obtenir des informations, mais surtout de créer du sens ensemble.
Bâtir des relations durables n’est pas une question de techniques, mais de présence et d’intention. Poser la bonne question au bon moment transforme la relation en un espace de confiance, d’apprentissage et de croissance mutuelle.
Pour approfondir cette pratique, je vous invite à:
Questions that Sell – Paul Cherry (édition 2017)
Balado Les Ambitieux, épisode 198 – Questions pour bâtir tes relations
Il anime le balado Les Ambitieux, qui compte près de 200 épisodes consacrés à la psychologie, à la gestion et au développement personnel. Ce balado a reçu le Prix de l’orientation 2023 de l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec.
Facteur H est un espace convivial de référence francophone en ressources humaines pour rester à l’affût des nouvelles tendances et trouver des solutions concrètes et applicables aux défis organisationnels d’aujourd’hui et de demain.