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La vie après le départ du nid

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Nathalie Carrier 4 avril 2023

Le départ de la maison des enfants crée souvent un espace vide qui nous amène à récupérer du temps, à ajuster notre perspective et à réévaluer nos besoins. Nombreux disent que c’est comme une sensation de perte ou un deuil qui peut générer de l’inconfort, pour les parents et pour les enfants. D’autres mentionnent que c’est plutôt similaire à une transition ou à un passage à un nouveau chapitre.  

 

Plusieurs personnes vont vivre cette étape sans se questionner, sans penser aux répercussions ou à la préparation nécessaire pour vivre en douceur ce passage entre deux périodes. Une amie me faisait l’analogie suivante autour d’un bon café cet hiver : « Quand nos enfants quittent la maison, c’est un peu comme si la famille devenait une chaise déséquilibrée. On doit apprendre à vivre et à être confortablement assis avec une patte, voire 2 ou 3 pattes en moins! ».  

 

Mes enfants grandissent et je vois poindre à l’horizon cette période de déséquilibre. J’imagine ne pas être la seule, et comme j’aime partager avec le suivant le fruit de mes réflexions, j’ai décidé d’écrire sur le sujet. Je me dis qu’il est important de planifier cette période où mes enfants quitteront le nid familial, car je suis particulièrement impliquée auprès d’eux et que je ne veux pas vivre ce chapitre de ma vie sans y être préparée… et prête! Bref, afin que le déséquilibre ne s’installe pas trop longtemps, je nous suggère d’agir et de nous mettre en marche.

 

Question de voir la chose autrement, je vous présente donc ici l’exemple d’une famille qui vivra cette transition ce printemps. Deux parents et trois enfants (devenus adultes maintenant!) qui ont décidé de vivre ça différemment et à leur couleur! Lisez bien la suite, ils sont vraiment inspirants!

 

Marc et Annabelle, vous avez décidé de vendre la maison familiale l’automne dernier. Comment en êtes-vous arrivés à cette décision?

Annabelle 

« Au départ, je croyais que cette décision était anticipée. Depuis l’adolescence des garçons, nous parlions en famille de ce passage à la vie adulte avec une perspective plus conventionnelle. Je ne voulais pas agir sur un coup de tête et je souhaitais surtout contribuer au développement de l’autonomie de mes enfants, étape par étape. Nous avons commencé par des week-ends au chalet sans eux, puis avons augmenté la durée et la fréquence de nos escapades. Je pensais sincèrement que le désir de quitter le nid viendrait de mes garçons. Et puis, la vie entre cinq adultes sous un même toit avec des besoins, des réalités et des horaires a accéléré notre décision de vendre la maison familiale. Nous voulions à tout prix conserver une relation saine, agréable et sans amertume avec nos fils. Un jour, sans crier gare, Marc et moi avons eu un coup de cœur pour un superbe condo. En plus d’avoir tous les attraits dont nous rêvions, ce condo nous permettra de rester proches des garçons, qui souhaitent demeurer dans leur ville natale. C’est donc à la suite de ce coup de cœur et de plusieurs échanges et conversations avec nos garçons que nous avons décidé de vendre la maison. N’ayant pas envie de vivre l’impatience de leur départ comme parents, on s’est dit qu’il fallait que les bottines suivent les babines, alors on a foncé! C’était moins anticipé que prévu finalement, mais c’était la bonne décision pour nous tous! Ça reste une décision chargée d’émotions et difficile à prendre, car ça change nos vies drastiquement! Je vis évidemment des hauts et des bas, et je fais confiance au processus. Être mère c’est pour la vie. Peut-être que nous n’habiterons plus ensemble physiquement, mais la connexion avec mes fils va toujours être présente! »

 

Marc 

« De mon côté, je n’ai pas vécu cette décision exactement comme Annabelle. En fait, mon processus décisionnel était nettement plus traditionnel et lié à une étape de vie que je pensais évidente : une fois le secondaire et le Cégep terminés, j’imaginais que mes fils iraient à l’université pour vivre en colocation, comme Annabelle et moi l’avions fait. J’étais prêt à investir pour eux, même s’ils devaient s’éloigner, afin qu’ils vivent la réalité universitaire avec des colocataires. 

 

L’économie actuelle, le prix exorbitant des appartements et surtout l’expérience postsecondaire plus ou moins agréable (car grandement influencée par la pandémie), qui ont modulé leur plan de carrière différemment de ce que je m’étais imaginé pour eux, ont changé la donne! Ça m’a poussé à faire un « recalcul en cours » assez rapidement pour changer ma perspective. Quand l’occasion d’achat du condo s’est pointée, je me suis à peine questionné. Comme la vente de la maison a été un peu plus longue que nous anticipions, ça nous a permis, finalement et heureusement, de vivre les étapes de transition naturellement. Ce qui est important de se rappeler, c’est que tout cela est parti d’une idée de David qui, à la suite de plusieurs conversations en lien avec notre cohabitation à cinq, a eu l’idée de vendre lui-même la maison familiale (il venait d’obtenir son permis de courtier immobilier) et ainsi pouvoir mettre un peu d’argent de côté pour voler de ses propres ailes. 

 

Deux grands moments plus intenses m’ont happé : l’offre officielle pour la vente de notre maison et la relecture de ce présent texte. Ça m’a fait réaliser qu’on était en train de tourner la page d’un chapitre que j’ai adoré et dont je suis particulièrement fier dans ma vie. Pour le futur, j’ai particulièrement hâte de les accueillir chez nous et d’aller les visiter chez eux. Je vois le tout comme un passage vers une relation différente, nourrissante. Je suis fier de les voir tracer chacun leur propre chemin et comme ils ne seront pas si loin, je ne suis pas inquiet, je suis confiant. »

 

Christopher et David, à l’aube du début de votre vie adulte, comment avez-vous réagi à la décision de vos parents et comment entrevoyez-vous votre prochain chapitre de vie?

David

« Je suis passé par plusieurs émotions différentes et contradictoires, de la tristesse à la joie en passant par l’inquiétude et l’euphorie. C’était comme si la relation (relation sucrée-salée causée par certains affrontements avec mes parents) allait changer à tout jamais. Je sais très bien que cette relation parent-enfant pourra enfin se développer vers une relation plus amicale et plus profonde. Je suis heureux de la tournure des événements, car cette décision me pousse à atteindre mes objectifs professionnels. Cependant, je suis aussi triste pour la valeur sentimentale de la maison et la nostalgie de tous ces souvenirs que j’y ai construits depuis l’âge de deux ans. 

 

Ce qui était particulier pour moi, c’est la pression personnelle et professionnelle que j’ai consenti à vivre. J’ai tout de même vendu la maison familiale et c’est aussi ma première vente en carrière! J’ai donc vécu une drôle de situation, où mes vies personnelle et professionnelle étaient remplies de zones grises. Finalement, ça a été une expérience particulièrement positive, car mes premiers clients m’aiment inconditionnellement et ils m’ont accompagné dans ce nouveau défi professionnel! Ce n’est tout de même pas banal! 

 

J’ai très hâte de vivre en appartement avec mes frères. Je comprends que nous allons devoir établir et respecter des règles de vie que nous choisirons ensemble. Je ne crois pas que ce serait mieux avec des colocs que je ne connais pas, au contraire. Avec mes frères, je sais que ce sera un nid sécuritaire et que l’ambiance sera bonne. Mes plans pour la suite sont surtout professionnels. J’ai de belles ambitions et je souhaite que ce mouvement, provoqué par mes parents à la suite de ma suggestion, me permette d’être plus concentré sur mes objectifs et me rende plus autonome, plus discipliné. Je souhaite vivre un temps de qualité choisi et planifié avec mes parents et voir cette relation évoluer, les découvrir autrement, développer des liens plus solides. »

 

Christopher 

« Ma réaction a été tout de même positive. J’avais le goût de partir au fond de moi et je sentais que j’avais besoin d’évoluer. J’avais cependant besoin d’un filet de sécurité et surtout que ça se fasse sans accros. Je vois la prochaine étape de ma vie comme un double défi. Un défi financier d’abord, car je dois prendre mes responsabilités et gérer mon propre budget seul, et ensuite le défi de vivre en harmonie avec mes frères, sans médiateur, car mes parents ne seront pas là pour arbitrer le match! Je souhaite que l’on soit capable de respecter nos règles à trois et d’être sur la même longueur d’onde en colocation. 

 

Je vis le moment présent et pour l’instant, il est difficile pour moi de me projeter dans l’avenir. Je sais que je veux être en mouvement, changer, évoluer, développer de la maturité et de la stabilité. En revanche, je ne sais pas exactement dans quelle direction ma vie et ma carrière vont aller. Mes parents m’ont toujours soutenu et ils m’ont en quelque sorte enlevé une épine du pied en prenant la décision de vendre la maison familiale, car ça s’est fait sans que j’aie à faire quoi que ce soit. 

 

Finalement, il y a un conseil que j’ai envie de donner à toutes les personnes qui liront cet article : faites confiance à vos enfants et au processus! Conseillez-les, donnez-leur des options, posez-leur des questions et laissez-les choisir et prendre des risques! Ce que vous avez semé comme parent portera fruit! »

 

Nicolas, comme cadet de la famille, comment vis-tu ce passage vers une nouvelle vie?

Nicolas 

« De retour d’un voyage en Grèce avec une amie, j’avoue avoir eu un certain choc quand j’ai compris que la décision était officielle, même si j’avais vu passer les messages dans notre groupe de clavardage de famille. Je me suis retrouvé devant le fait accompli. Maintenant, je réalise que c’est plus facile comme ça, je n’ai pas eu à prendre la décision! J’ai eu un peu de difficulté à accepter leur choix cependant. J’étais très confortable dans cette maison et comme je compte continuer d’étudier pour aller à l’université, mon plan n’était pas du tout de quitter ce printemps, à 19 ans. Je suis actuellement aux études au collégial et je travaille à temps partiel, alors j’ai un rythme de vie qui n’est pas comparable à celui de mes frères. J’ai une réalité et une posture différentes d’eux, et ce qui m’inquiète le plus est davantage en lien avec la relation que nous aurons dans notre appartement. 

 

Évidemment, je suis heureux pour l’autonomie et l’indépendance que cela pourra m’apporter. Je vois les avantages de ma liberté d’action et je suis conscient que je suis un adulte. Cependant, je suis plus inquiet que mes frères, du moins, je crois. Je sais que j’ai vécu (et que je vis) toutes les étapes du changement : le déni, la colère, les peurs, la joie et la désorientation. Je vis un peu ça comme un deuil ou une rupture. Et, j’avoue que ce qui m’inquiète le plus est le déménagement, car ça va tomber en plein dans ma période d’examens. Je tente de ne pas trop y penser. 

 

Mon message à mes parents est le suivant : vous êtes passés par là (une étape de vie qui finit, des relations qui changent, de l’inquiétude face à la suite), alors n’oubliez jamais que vous avez fait un excellent job de parents! Aujourd’hui, je réalise l’importance de célébrer ce passage de l’adolescence à la vie adulte par un rite quelconque que j’aimerais mettre en branle avec mes frères et mes parents. Question de bien boucler la boucle. »

 

Ce que nous apprend leur histoire

Chaque personne est le leader de son parcours professionnel et personnel. Chaque individu a ses besoins, ses préoccupations, ses nuances et son style de vie. Chaque adulte est maître de son destin et de ses aspirations. Chaque organisation ou équipe possède ses règles, ses valeurs et ses objectifs. Chaque famille ou couple possède son mode de fonctionnement et ses façons de faire. C’est ça, la diversité, et c’est très bien ainsi! 

 

Je trouve que l’histoire de la famille de Marc, Annabelle, David, Christopher et Nicolas nous montre bien comment on peut faire des choix qui nous ressemblent et qui nous conviennent, en fonction de nos besoins, de nos aspirations, de nos ambitions et de nos rêves. Je trouve rassurant et inspirant de les voir évoluer et surtout de contribuer, par cet article, à marquer la fin d’un chapitre de leur vie familiale. Je me relis et j’avoue vivre un moment d’émotion pour eux. Je me sens privilégiée d’avoir pu raconter leur histoire, une belle histoire qui laissera sa trace.

 

Mise à jour!

Depuis la rédaction de cet article, il y a environ un mois, les choses ont évolué dans la famille de Marc et Annabelle! Effectivement, Nicolas vivra finalement une transition différente de ses frères en habitant chez ses parents pour le moment. Il cherchera ensuite un appartement avec un ami. Comme quoi la communication, l’écoute et l’agilité sont des compétences aussi importantes pour les leaders que pour les parents!

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À propos de Nathalie Carrier

Passionnée par le contact avec les gens, elle conçoit, anime et diffuse des formations auprès de leaders d’entreprise depuis une vingtaine d’années.

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