Dans un marché de l’emploi en ébullition, les entreprises redoublent d’efforts pour attirer les meilleurs talents. Mais une fois les postes comblés, un autre défi émerge: les garder.
Or, la rétention ne dépend pas uniquement du salaire ou des avantages. Elle repose sur un facteur souvent sous-estimé: la qualité du leadership et, plus précisément, la capacité émotionnelle des gestionnaires à créer un climat de confiance et d’appartenance.
Selon des données récentes de Gallup, près de 70% des personnes employées affirment que leur gestionnaire influence directement leur bien-être psychologique et leur engagement au travail.¹ Autrement dit, investir dans le développement émotionnel des leaders, c’est investir dans la stabilité des équipes.
Les gestionnaires d’aujourd’hui doivent jongler avec la performance, la transformation numérique, la gestion du changement, le télétravail, la diversité… et l’humain, toujours plus complexe.
Pourtant, peu d’organisations offrent une véritable formation à l’intelligence émotionnelle. On les outille à planifier, à évaluer et à produire, mais rarement à écouter, à réguler ou à reconnaître.
Résultat: des leaders qui s’épuisent et des équipes qui se désengagent.
La professeure Marie-Claude Gaudet de HEC Montréal rappelle que les gestionnaires dotés d’une forte intelligence émotionnelle démontrent non seulement une plus grande efficacité, mais favorisent aussi une meilleure performance collective.² Et quand les équipes se sentent soutenues, elles restent.
Popularisée par Daniel Goleman, l’intelligence émotionnelle repose sur cinq piliers: la conscience de soi, la maîtrise de soi, la motivation, l’empathie et les aptitudes sociales.³
Ces compétences sont aujourd’hui aussi cruciales qu’une formation en gestion de projet ou en communication. Pourquoi? Parce qu’elles influencent la qualité des relations, la collaboration et la sécurité psychologique au sein des équipes – trois éléments notamment identifiés par la Harvard Business Review comme étant étroitement liés à la rétention du personnel.⁴
Comme le souligne Estelle Morin de HEC Montréal, les compétences liées à l’intelligence émotionnelle sont «essentielles à l’exercice du leadership, car ce dernier a pour fonction d’amener des personnes à s’engager dans un projet collectif et à y investir leur énergie et leur temps pour atteindre des objectifs communs et valorisés».⁵
De plus en plus d’organisations reconnaissent que la performance durable passe par le développement humain. Elles forment leurs gestionnaires à:
Ces formations ont un impact mesurable: réduction du taux de roulement, meilleure satisfaction des équipes et hausse du sentiment d’appartenance. Autrement dit, outiller les gestionnaires émotionnellement, c’est réduire les départs évitables.
Une personne gestionnaire qui remercie sincèrement, qui prend le temps d’écouter avant de réagir ou qui admet sa propre vulnérabilité n’affiche pas de faiblesse: elle inspire la confiance. Ces comportements, appris et entretenus, deviennent la trame invisible d’une culture de loyauté.
Pierre Lainey, maître d’enseignement à HEC Montréal, parle même de «contagion émotionnelle»: les émotions d’une personne leader se diffusent dans toute l’équipe.² Former les gestionnaires à mieux les gérer, c’est donc influencer positivement l’ambiance de travail et la motivation collective.
Dans un marché de l’emploi où les talents choisissent leurs employeurs autant que l’inverse, les organisations qui priorisent le développement de l’intelligence émotionnelle de leurs gestionnaires se démarquent.
Elles offrent à leurs équipes ce que les salaires ou les horaires flexibles ne peuvent garantir: un sentiment d’être vus, compris et soutenus.
Former les leaders à l’intelligence émotionnelle, ce n’est pas une dépense en formation. C’est un investissement stratégique dans la fidélisation, la santé psychologique et la performance durable.
Parce qu’au bout du compte, les personnes employées ne cherchent pas seulement un poste: elles cherchent un endroit où elles se sentent bien.
Gallup. (2023). State of the Global Workplace 2023: The Voice of the World’s Employees. Gallup.
Revue Gestion. (2022). Intelligence émotionnelle et empathie : des alliées précieuses en milieu de travail. Revue Gestion.
Goleman, D. (1995). Emotional intelligence: Why it can matter more than IQ. Bantam Books.
Druskat, V. U. (2025). Do you have an emotionally intelligent team? Harvard Business Review.
Morin, E. M. (2024). Quatre habiletés émotionnelles indispensables. Revue Gestion.
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