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A-t-on le droit d’être «plate» au travail?

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Katherine Poirier 30 janvier 2023

On parle souvent des bienfaits des activités sociales au travail et de l’humour entre collègues qui agrémentent l’esprit d’équipe. A-t-on le droit par contre de ne pas adhérer à ces activités sociales? De ne pas adhérer aux valeurs alliant plaisir et travail, lorsque l’organisation en a instaurées?

La jurisprudence au Québec n’a pas directement traité de cette question. Par contre, la Cour de cassation de Paris a récemment réintégré dans ses fonctions un directeur de compte qui avait refusé d’adhérer à la politique « fun & pro » de son employeur, Cubik Partners. Cette politique impliquait de prendre part à des séminaires, des sorties la fin de semaine et le partage de ses passions personnelles.

Selon le directeur de compte, ces activités se traduisaient par une alcoolisation excessive encouragée par les associés, et par des pratiques « liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages ».

Au soutien de son refus, le salarié indiquait que ces obligations brimaient sa liberté d’expression.

L’employeur soutenait plutôt que le salarié avait été congédié pour « insuffisance professionnelle », liée à sa critique des méthodes de gestion de l’organisation, sa rigidité, son manque d’écoute, son ton parfois cassant et démotivant vis-à-vis de ses subordonnés et son impossibilité d’accepter le point de vue des autres, ce qui constituait une critique de son comportement et ne constituait pas une remise en question de son opinion.

Le tribunal a conclu que puisque le congédiement était en partie fondé sur le comportement critique du salarié et sur son refus d’accepter la politique de l’entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro », mais aussi l’incitation à divers excès, qui participent de sa liberté d’expression et d’opinion, le congédiement violait ses droits fondamentaux et devait être renversé.

Certes, au Québec non plus un.e salarié.e n’a pas l’obligation de prendre part aux activités sociales optionnelles de son employeur, encore moins lorsque celles-ci se déroulent dans un cadre complètement extérieur à l’exercice des fonctions et impliquent une consommation d’alcool démesurée.

Bien qu’il puisse être souhaitable pour l’intégration dans l’équipe que chacun.e de ses membres tisse des liens interpersonnels en prenant part à des activités de cohésion d’équipe, le choix de celles-ci fera toute la différence quand viendra le temps de les rendre essentielles au maintien en poste.

Il aurait été intéressant de voir la position du tribunal si les activités n’avaient pas impliqué une incitation à « l’alcoolisation excessive » et à « des pratiques liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages », le tribunal semblant blâmer le type d’activités préconisées et donc supporter la liberté d’expression dans ce contexte.

Une chose est sûre : si un.e salarié.e exécute bien ses fonctions professionnelles, mais ne prend pas part à la « vie du bureau » à l’extérieur des heures d’affaires, on ne saura y voir là une cause juste et suffisante de fin d’emploi en vertu des lois en vigueur au Québec.

Pour les plus curieux qui désirent lire la décision, c’est ici :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046555948?init=true&page=5&query=&searchField=ALL&tab_selection=juri

 

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À propos de Katherine Poirier

Conseillère en ressources humaines agréée, Katherine conseille et représente les organisations de tous les secteurs d'activité.

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