Dév. organisationnelDroit du travailLeadershipRémunérationSanté/sécuritéMarketing RH

Maintenir la motivation en dépit des obligations peu attrayantes

jacques forest
Jacques Forest 2 septembre 2025

Avec la collaboration spéciale de Jessica Ouellet

Si on vous disait qu’il était possible d’amener les gens à adopter des comportements altruistes – ou prosociaux – dans la société et au sein de leur organisation, vous seriez probablement sceptiques, mais cela éveillerait certainement votre curiosité. De même, si on tentait de vous persuader qu’on peut agir non seulement sur la motivation des personnes à effectuer des tâches agréables, mais aussi à remplir des obligations qui, de prime abord, sont peu attrayantes, vous seriez certainement incrédules.

Eh bien, sachez qu’on peut bel et bien influer sur la motivation des individus à adopter des comportements prosociaux, même pour des tâches aussi peu plaisantes que de payer des impôts!

Les comportements prosociaux consistent, de façon générale, à poser un geste pour améliorer une situation ou bénéficier à autrui. À la lumière de cette définition, le paiement des impôts sur le revenu peut être considéré comme une action prosociale, car elle contribue à réduire les inégalités en répartissant plus équitablement la richesse.

Nos recherches démontrent qu’il est possible d’intervenir sur la motivation des individus pour qu’ils adoptent des comportements favorisant la conformité fiscale. Plus précisément, nous nous appuyons sur la théorie de l’autodétermination pour explorer les mécanismes psychologiques qui influencent la décision d’une personne de se conformer ou non aux règles fiscales.

La théorie de l’autodétermination permet notamment de comprendre pourquoi certaines situations mènent à la satisfaction ou à la frustration des besoins psychologiques universels d’autonomie, de compétence et d’affiliation. En effet, plus d’une centaine d’études, répertoriées dans un large éventail de domaines (travail, éducation, sport, parentalité, etc.), démontrent comment les individus qui perçoivent leurs besoins psychologiques comme étant satisfaits sont plus enclins à adopter des comportements optimaux à l’égard du bien-être individuel et sociétal. À l’inverse, ces trois mêmes besoins, lorsque frustrés, sont associés à une résistance accrue à poser des actions prosociales, à un niveau de mal-être supérieur et à une performance au travail sous-optimale. En d’autres termes, il serait possible de stimuler la conformité aux règles fiscales par la satisfaction de ces trois besoins :

  • Autonomie : le sentiment de pouvoir faire des choix qui correspondent à son identité
  • Compétence : se sentir efficace en relation à son environnement social
  • Affiliation : le sentiment d’être en lien, de bénéficier de la reconnaissance et du soutien des autres, et de pouvoir faire de même pour autrui

En tirant parti des connaissances de la psychologie comportementale, nous émettons l’hypothèse que les occasions d’améliorer la conformité fiscale peuvent être bonifiées en comprenant ce que les gens souhaitent exprimer sur le plan des préférences personnelles (besoin d’autonomie), en donnant l’occasion aux citoyens et citoyennes de reconnaître l’impact positif direct du paiement des impôts sur leur environnement (besoin de compétence) et en assimilant la conformité fiscale à un devoir civique (besoin d’affiliation). Dans cette optique, nous anticipons que notre projet permettra de mettre de l’avant des politiques publiques axées sur le bien-être et la motivation humaine.

S’il est possible d’influencer positivement le comportement des citoyens et des citoyennes pour un sujet aussi polarisant que le paiement des impôts en identifiant les composants de la satisfaction des besoins, imaginez les miracles qui pourraient être accomplis en appliquant les mêmes principes en milieu organisationnel! Comprendre les éléments qui contribuent à satisfaire ou à frustrer les besoins du personnel n’a rien de sorcier. Ils sont généralement de trois catégories : la conception des tâches, les relations interpersonnelles/le leadership et la rémunération. Ensemble, ils visent à accroître la qualité de la motivation au travail et, par conséquent, le fonctionnement optimal.

Que vous soyez gestionnaire, spécialiste en entraînement sportif, personnel enseignant ou parent, il peut être pertinent de prendre du recul et de vous demander comment vous pourriez changer vos méthodes pour mieux satisfaire vos besoins et ceux de votre entourage ou équipe. Voici quelques pistes de réflexion qui vous aideront à transposer ces principes dans votre quotidien organisationnel :

Conception du travail : Les attentes imposées aux membres de votre équipe sont-elles trop exigeantes sur le plan cognitif ou émotionnel? Prenez-vous le temps de discuter de ces défis et de clarifier les exigences?

Relations interpersonnelles : Pensez-vous que vos collaborateurs et collaboratrices aiment que vous leur déléguiez une tâche ou trouvent cela significatif? Lorsque vous effectuez un suivi, fournissez-vous une rétroaction qui satisfait les trois besoins psychologiques?

Rémunération : Utilisez-vous les récompenses pour faire pression sur les autres ou pour fournir un retour d’information et exprimer votre gratitude?

Il importe de garder à l’esprit que prendre soin des trois besoins de la motivation est essentiel pour améliorer l’expérience de vie de votre personnel et, par conséquent, votre performance globale.

En outre, pour augmenter le bien-être individuel, collectif et organisationnel, il est nécessaire de repositionner l’humain au cœur de nos décisions. Certaines personnes trouvent satisfaisant de payer leurs impôts ou de finaliser leur budget annuel, alors que d’autres perçoivent plutôt ces tâches comme une source de frustration. Retenons donc qu’agir sur les trois besoins psychologiques constitue une façon concrète de mettre de l’avant des pratiques qui favorisent l’émancipation humaine, tant au sein d’une société que d’une organisation.

Jessica Ouellet, M. Sc., CRHA

Jessica est une doctorante en comportements organisationnels à l’École des sciences de la gestion (ESG) de l’UQAM. Elle détient une maîtrise en développement organisationnel de HEC Montréal. Elle souhaite contribuer à la réduction des inégalités économiques. Sa thèse porte sur la compréhension des mécanismes psychologiques permettant d’influencer la conformité fiscale.

Elle est actuellement chargée de cours en ressources humaines à l’ESG UQAM. En outre, elle exerce comme consultante, puisqu’elle est conseillère en ressources humaines agréée (CRHA).

En tant qu’ambassadrice de la recherche pour l’UQAM, elle a pour objectif de démocratiser cette activité universitaire et de promouvoir les applications pratiques découlant des travaux théoriques.

Partagez
jacques forest
À propos de Jacques Forest
En savoir plus

Facteur H est un espace convivial de référence francophone en ressources humaines pour rester à l’affût des nouvelles tendances et trouver des solutions concrètes et applicables aux défis organisationnels d’aujourd’hui et de demain.

Contactez-nous
© Facteur H - Tous droits réservés 2025 | Conception de site web par TactikMedia
crossmenuarrow-right